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Répercussions de la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Redwater sur le secteur de l’assurance
Perspectives Aon

Répercussions de la décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Redwater sur le secteur de l’assurance

 

Le 31 janvier 2019, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision très attendue dans l’affaire Orphan Well Association, et al. c. Grant Thornton Limited, et al. que l’on appelle familièrement « Redwater ». Sous la surveillance étroite des participants et des intervenants du secteur de l’énergie, la Cour s’est demandé si les syndics de faillite pouvaient renoncer à l’intérêt d’un débiteur insolvable dans des actifs non productifs sous licence en vertu du paragraphe 14.06(4) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (LFI) fédérale. En 2015, le principal prêteur garanti de Redwater Energy Corp. (Redwater) a exigé le remboursement des titres de créance de Redwater; Grant Thornton Limited (GT) a ensuite été désignée comme séquestre. GT a informé l’organisme de réglementation de l’énergie de l’Alberta (Alberta Energy Regulator ou AER) qu’elle ne prendrait le contrôle que de certaines propriétés de Redwater autorisées par l’AER qui avaient de la valeur; les autres propriétés ont été déclinées par GT. Par la suite, l’AER a rendu une ordonnance de fermeture et de cessation d’exploitation à l’égard des actifs déclinés et a déposé une demande auprès du tribunal pour obliger GT à se conformer à l’ordonnance et à respecter les obligations légales de cessation et de remise en état de Redwater relativement à tous les actifs sous licence. Redwater a par la suite été mise en faillite, et GT est devenue le syndic de faillite. Peu après, GT a rejeté les actifs non rentables de Redwater en vertu du paragraphe 14.06(4) de la LFI et a indiqué qu’elle n’avait pas l’intention de respecter l’ordonnance de l’AER.

Le tribunal de première instance a conclu que GT était autorisée à renoncer aux intérêts d’un débiteur insolvable dans des actifs sous licence non rentables tout en conservant et en vendant des actifs de valeur sous licence afin de maximiser le recouvrement pour la succession du débiteur. Par conséquent, la réclamation du créancier garanti de Redwater avait priorité sur les obligations légales provinciales de cessation et de remise en état. La Cour d’appel de l’Alberta a confirmé la décision. Toutefois, la Cour suprême du Canada a finalement annulé la décision, concluant que, même si le paragraphe 14.06(4) protège le syndic de toute responsabilité personnelle, il ne lui permet pas de se soustraire aux obligations environnementales de la succession du failli. Le tribunal a donc conclu que les obligations de cessation et de remise en état que la succession de Redwater avait envers l’AER n’étaient pas assujetties au régime de priorité des créanciers de la LFI. Cette décision permet à l’AER d’exiger désormais des syndics de faillite qu’ils dépensent les actifs de la succession pour respecter les obligations restantes de cession et de remise en état de la succession, ce qui laisse moins d’argent aux créanciers assujettis au régime de priorité prévu par la LFI. En cas d’insolvabilité, les prêteurs ne peuvent désormais se rétablir qu’après avoir transféré des millions de dollars, potentiellement, de l’actif du failli à des obligations de cessation et de remise en état prescrites par la loi en fin de vie.

Même si cette décision aura incontestablement un impact sur le contexte d’investissement et de prêt dans le secteur de l’énergie, les répercussions sur le secteur de l’assurance ne sont pas prévues à court terme. Une assurance responsabilité civile des administrateurs et des dirigeants ne répondra pas aux obligations de cessation et de remise en état d’une personne morale soumise à une liquidation, ni à aucune de ses autres responsabilités en matière d’assainissement de l’environnement. Si des obligations d’assainissement de l’environnement devaient être imposées personnellement aux administrateurs ou aux dirigeants par effet de la loi, ce qui n’était pas le cas dans l’affaire Redwater, une assurance des administrateurs et dirigeants pourrait fournir une certaine protection aux assurés individuels. La police d’assurance exclusive des administrateurs et dirigeants d’Aon couvre les pertes non indemnisables encourues par des assurés individuels dans le cadre d’une ordonnance de remise en état ou de nettoyage de l’environnement. Toutefois, la protection offerte par les formulaires des administrateurs et des dirigeants d’une société ouverte est plus limitée – certains assureurs canadiens offriront un avenant avec sous‐montant de garantie à certaines sociétés qui offrent une certaine couverture aux assurés individuels s’ils font face à des frais de nettoyage imposés en vertu des articles 17 ou 18 de la Loi sur la protection de l’environnement de l’Ontario. Toute lacune potentielle dans la prise en charge des coûts d’assainissement de l’environnement pourrait être comblée par une police d’assurance complémentaire contre la responsabilité civile des administrateurs et dirigeants avec clause pour risques inhabituels non indemnisables, qui se situe au-dessus de la police d’assurance des administrateurs et des dirigeants principale et qui descend pour fournir une couverture étendue aux assurés individuels pour la plupart des questions non couvertes par la police principale. Dans cet ordre d’idées, Aon a réussi à ajouter un libellé affirmatif à son formulaire exclusif de police d’assurance complémentaire contre la responsabilité civile des administrateurs et dirigeants avec clause pour risques inhabituels non indemnisables, qui couvre explicitement les frais de remise en état engagés par les assurés individuels pour se conformer à une ordonnance rendue par un organisme de réglementation de l’environnement.
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